La Dame de Canton ………………. mamma du ” slow design “

Février 1986. A vingt-quatre ans, peu préocupée de fashion, de design (même slow design), je trépignais plutôt à la lecture d’Ella Maillart, Alexandra David Neel, JMG Le Clézio, Thor Heyerdhal …

(ph. Véronique Paul)

Alors pensez !
un nez à nez avec une jonque chinoise de 25 mètres amarrée entre deux chalutiers dans le port de Roscoff; “à l’époque” (hi!) j’étais jeune journaliste au Télégramme de Brest.

Une carte de presse au fond de mon sac (pas encore en voiles) et un aller simple sur La Dame de Canton qui m’embarqua comme “matelot 4e catégorie”, j’ai quitté la Bretagne. (ph. Véronique Paul)

L’ex ELF-Chine née à Canton en 1979 sous l’impulsion de Vincent Clouzeau et Niels Lutyens -premier bateau de l’histoire du sponsoring, patrimoine maritime de la France, barrée par un équipage de “marine marchande”, journalistes, photographes, un artiste polonais Marek, – s’apprêtait à traverser l’Atlantique invitée à fêter à New-York, le centenaire de la Statue de la Liberté et descendait vers le Portugal se refaire une santé.


La Dame de Canton longeant East Village à New-York (ph. Véronique Paul)

Deux ans de vacances, chantier à Matosinhos (Portugal), escale aux Bermudes, dans les ports de la côte Est des Etats-Unis de cap Hatteras à Martha’s Vineyard (Maine) puis glissade vers les Antilles.

Deux ans pour écouter les bambous craquer la nuit pendant les quarts, sentir en pénétrant dans le grand Carré l’odeur du bois de camphrier, sympathiser avec des pêcheurs bermudiens (ci-dessous)


(ph. Pascale Cassitto)

et à Newport avec les préparateurs du Ecureuil d’Aquitaine de Titouan Lamazou au départ de la 2ème BOC Challenge, vivre avec stupeur le démâtage du mât de misaine, chercher et fixer les bambous de la Basse Terre en Guadeloupe sur la nouvelle voile misaine, apprendre à coudre à la pommelle comme on apprend la piquante vie en communauté.

Deux ans pour voir le monde sous un autre angle et penser à une trajectoire, dépourvue de l’esprit de compétition, maladie grave en Occident ! (en Chine aussi aujourd’hui)
Ainsi, de “Slow navigation” -à bord d’une jonque qui traverse l’Atlantique en 35 jours- il était concevable, sans être ni limace ni baba-cool, de s’engager POUR le “slow design”, POUR le Naturel et la Simplicité … et alors ?
il faudra encore attendre, patience… dix longues années pour trouver l’amour de celui (l’italien perfectionniste) avec qui, à deux, permettra de créer Relations de voyages la marque qui mijote les sacs en voiles recyclées.


La Dame de Canton en chantier à Terre de Haut-Les Saintes (ph. Pascale Cassitto)

Si le terme “slow design” est dérivé de l’expression anglo-saxonne « Slow Food », mouvement fondé en Italie en 1986, par Carlo Petrini en opposition avec la “fast food” et la production d’objets standardisés vendus à grande échelle,
il est aussi le prolongement de l’éco-design : mettant l’objet, l’humain (qui créé et reçoit), l’environnement, au coeur du projet
(et non la seule rentabilité ou la satisfaction de la cupidité).


ph.Vincenzo Cassitto
Bien loin du travail des ouvrières enfermées dans les usines au Bangladesh, condamnées aux gestes répétitifs ou à l’utilisation de produits toxiques, le slow design ne réduit pas du tout à la lenteur ; il ouvre l’imagination et contient tous les plaisirs du “faire”.


(ph. Vincenzo Cassitto)
Il vise à produire du bien-être, il encourage la rigueur, l’esprit critique et la liberté de choisir.
A condition de ne pas “faire semblant”.
Et même si son coût est supérieur à celui d’un objet industriel, l’objet “slow design” procure à l’acheteuse/eur le sentiment de ne pas être considéré(e) comme un banal consommateur mais comme une rencontre.

Pour davantage de détails et l’actualité du mouvement Slow, consultez:
Slow Lab
Slow Movement